Un été d'analyse de données / Chronique d'une fin de thèse II
13 July 2015 - 8:27am
Dans un blogue précédent, je vous racontais globalement mon parcours depuis le début de mes études doctorales: les hauts et les bas, les doutes et les moments exaltants.
Aujourd'hui, quelques mois plus tard, je souhaite vous parler de l'analyse de données. En mai, je terminais ma collecte de données: plus de 550 élèves avaient alors répondu à mon questionnaire sur les manuels et l'histoire du féminisme. J'ai aussi rencontré 9 élèves pour une entrevue en profondeur.
Et puis aujourd'hui, me voilà avec cette avalanche de données à analyser. Un véritable coffre aux trésors! Au tout début de l'analyse, je débordais d'enthousiasme. J'étais fascinée par les réponses. Certes, les données confirmaient généralement mes hypothèses de recherche. Mais certaines réponses d'élèves étaient d'une richesse inespérée. De véritables joyaux: des réflexions poussées d'adolescents qui allaient bien plus loin que tout ce que j'aurais pu imaginer.
Mais il fallait aller au-delà des premières impressions. L'analyse, puis l'interprétation de cet imposant corpus de réponses devait maintenant se faire de façon plus systématique, en respectant un cadre servant à délimiter les tendances lourdes.
L'historienne en moi n'aime pas trop les logiciels d'analyse: le fameux codage de données (le logiciel que j'utilise est QDA-Miner, comme sur l'image de gauche). J'aime l'interprétation, j'aime mettre en valeur les exceptions, les discours qui sortent de la norme... Malheureusement, le codage, c'est l'opposé de tout ça. Le codage, c'est la catégorisation des réponses: c'est tout mettre dans des cases afin de faire ressortir un portrait global et réaliste de la situation. C'est scientifique, c'est rationnel et méthodique. C'est parfois... ennuyant, lassant, répétitif.
J'en comprends la nécessité. Je sais que cette analyse rigoureuse, surtout lorsqu'elle est appuyée par un contre-codage (lorsqu'une autre personne classe mes données de manière presqu'identique), vient démontrer le sérieux de ma recherche. Elle me permet de faire avancer les connaissances en didactique de l'histoire.
Je sais tout ça... Mais ce type d'analyse me fait aussi perdre mon enthousiasme. À tout classer dans des boîtes, j'ai l'impression de laisser échapper des perles; des extraits si riches qu'ils en sont difficiles à coder, à classer. Ils ne ressemblent pas aux autres: ils n'entrent pas dans une boîte. Ils sont si différents des autres extraits qu'ils risquent de se perdre dans un ensemble qui apparaît en surface homogène et où les exceptions sont en quelque sorte rejetées afin de dresser le portrait général.
Oui, je conserve une place dans mon interprétation à ces quelques extraits si particuliers. Ils seront là, quelque part dans ma thèse; je réfléchis à une façon de leur donner une voix. Pourquoi? Parce que les élèves qui m'ont donné ces réponses avaient des choses à dire et ils souhaiteraient certainement qu'on les écoute.
Avez-vous déjà eu ces sentiments en analysant les données pour vos recherches?
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