Une question de temps
24 Avril 2014 - 11:14am
L’année 2013-2014 restera pour le Projet de la pensée historique l’année de ses meilleurs et de ses pires moments.
Nous avons connu nos meilleurs moments lorsque deux des plus grandes provinces canadiennes ont mis en place des mesures consolidant l’adoption des idées du Projet dans leur curriculum. L’Ontario a mis sur pied un nouveau curriculum qui intègre les concepts de la pensée historique au cœur du programme d’histoire de la maternelle à la 12e année. La Colombie-Britannique a pour sa part publié un projet de curriculum en sciences humaines adoptant à peu près les mêmes orientations. Si bien que les demandes de perfectionnement professionnel et de matériel en pensée historique ont monté en flèche.
Nous avons connu les pires moments lorsque nous avons appris que le Projet, sous la forme adoptée depuis sept ans, se terminerait. Le déclencheur immédiat est la fin du financement de Patrimoine canadien. Depuis 2008, le Programme des études canadiennes du Ministère fournissait la majeure partie de notre soutien financier. Ce Programme a été rebaptisé « Fonds pour l’histoire du Canada » et sera « axé sur des projets qui célèbrent les moments importants de l’histoire et les personnes qui ont façonné le pays dans lequel nous vivons aujourd’hui. »
À titre d’organisme visant la promotion de « la littératie critique en histoire au 21e siècle », le Projet de la pensée historique n’a jamais embrassé les notions de « célébration » ou de nationalisme comme objectifs à atteindre en pédagogie de l’histoire. Le Projet a plutôt cherché à encourager le développement des compétences des élèves afin qu’ils puissent contribuer de façon éclairée et rationnelle aux débats sur notre passé et notre avenir. Qu’il soit question de revendications territoriales ou d’utilisation des ressources, de construction de la nation ou de mondialisation, d’histoires sur les origines ou de récits de migration, d’héroïsme extraordinaire ou de crimes historiques collectifs, nous avons cherché à outiller les enseignants et les éducateurs muséaux afin qu’ils aident les élèves à maîtriser le processus complexe qui permet de dégager une compréhension historique éclairée, critique et basée sur la preuve.
Peut-être n’était-ce qu’une question de temps avant que les bailleurs de fonds et leurs bénéficiaires se séparent.
Nos avons connu d’énormes succès depuis la création du Projet en 2006. Nous avons bâti un réseau national dynamique de pédagogues de l’histoire. Nous avons facilité la tenue de conversations entre les fonctionnaires des ministères provinciaux et territoriaux responsables de l’enseignement de l’histoire à travers le pays, un fait sans précédent. Nous avons fait naître une nouvelle génération de manuels scolaires et de matériel pédagogique qui encouragent activement l’utilisation de la pensée historique. Nous avons formé une nombreuse cohorte de leaders enseignants capables d’enrichir le travail de leurs collègues. Nous avons été reconnus par la communauté internationale en pédagogie de l'histoire pour les réalisations canadiennes dans ce domaine.
Bien sûr, il y a encore trop de par cœur, de discussions qui ne mènent à rien, de formation inadéquate et de ressources périmées dans l’enseignement de l’histoire au Canada. Le travail n’est pas terminé.
Le 31 mars 2014, notre coordonnatrice nationale, Jill Colyer, dont le travail acharné, le sens de l’humour, les sages décisions et l’inspiration créatrice ont été au cœur même des réalisations du Projet depuis 2009, n’aura plus de salaire. D’ici là, nous vous invitons à vous joindre aux délibérations sur la meilleure façon de prolonger l’impact des retombées du Projet et d’augmenter le nombre de personnes formées à l’intégration de la pensée historique dans les classes du pays. Nous avons hâte de recevoir vos idées.
Le projet de la pensée historique est mort, vive la pensée historique!
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