Évaluer la pensée historique (Peter Seixas)
Google a radicalement transformé notre relation à l’information en général et, à plus petite échelle, aux petites parcelles de renseignements factuels. L’évaluation de l’apprentissage de l’histoire au secondaire, qui pendant plus d’un siècle a valorisé ces parcelles comme étant le cœur de sa pratique, doit aujourd’hui en traiter une surabondance sans précédent. Ces parcelles d’information sont de plus en plus nombreuses, de plus en plus faciles à trouver et de moins en moins valables. L’histoire enseignée à l’école se retrouve devant une crise d’information et la simple mémorisation des faits ne peut plus être le seul but du jeu.
Alors, à quoi faut-il s’attendre de l’enseignement de l’histoire au secondaire, en-dehors de faits appris sur le bout des doigts? Après un arrêt de quelques années suivant le travail avant-gardiste du British Schools Council History Project, les programmes-cadres en histoire et les énoncés de normes se tournent de plus en plus vers des définitions explicites de la pensée historique. La progression des élèves en histoire dépasse la simple accumulation de connaissances factuelles sur un nombre croissant de sujets (ce qui ne disparaîtra pas) pour inclure le perfectionnement de leurs habiletés à jouer avec des problèmes d’histoire.
Les programmes et les énoncés de normes ont cependant progressé plus vite que les évaluations. Si l’histoire mémorisée est encore incluse dans le processus d’évaluation, c’est notamment à cause de la facilité et de l’efficacité de ce mode d’évaluation. En comparaison, l’évaluation de la pensée historique est un lourd, mais inéluctable défi auquel nous sommes confrontés dans nos projets.
En janvier 2012, la rencontre annuelle du Projet de la pensée historique (Projet) a été entièrement consacrée à l’évaluation de la pensée historique. Il y a eu des présentations par l’équipe d’histoire du Advanced Placement Program aux États-Unis; par une équipe de chercheurs suédois de l’Université Malmö responsables des examens nationaux d’histoire; par Denis Shemilt, pionnier du Schools Council History Project au R.-U.; par une équipe de chercheurs de la Stanford University; et par des chercheurs et des enseignants canadiens.
Dès le début de son existence, le Projet a reconnu le rôle essentiel de l’évaluation et a contribué à la conception d’outils d’évaluation pour la classe, créant des rubriques pour évaluer le travail des élèves. Aujourd’hui, le tout nouveau Projet d’évaluation de la pensée historique a entrepris la prochaine étape. Une équipe interdisciplinaire de chercheurs de UBC travaille à l’enrichissement des évaluations pour la classe et à l’inclusion de la pensée historique dans les évaluations à grande échelle et à l’échelle des écoles, des districts et des provinces.
En plus de moi-même, ayant une expertise en pédagogie de l’histoire, l’équipe est composée de la professeure Kadriye Ercikan, qui a une expertise en évaluation et mesure, et de deux doctorants en fin de parcours, Lindsay Gibson (pédagogie de l’histoire) et Juliette Lyons-Thomas (évaluation et mesure). Nous avons conçu une évaluation et dirigé une étude de validation qui comprenait une évaluation en groupe pour 441 élèves de la 11e année à Kelowna et l’application individuelle d’un protocole « penser tout haut » auprès de 35 élèves de Vancouver qui commentaient au fur et à mesure qu’ils lisaient les questions et y répondaient. Kadriye a présenté un résumé de ce projet à la rencontre annuelle du Projet en janvier et nous avons présenté deux communications lors des rencontres de Vancouver de l’American Educational Research Association.
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