Recherches du groupe GREDICS en conscience historique et conscience citoyenne (Joan Pagès et Antoni Santisteban)
Nous présentons ici deux travaux de recherche du groupe GREDICS (Grup de Recerca en Didàctica de les Ciències Socials – Groupe de recherche en didactique des sciences sociales) de l’Universidad Autónoma de Barcelona. Les membres du groupe comprennent Joan Pagès (chercheur principal), Antoni Santisteban (coordonnateur), Neus González, Montserrat Oller, Cecília Llobet, Edda Sant, Marta Canal, Roser Canals et Joan Llusà.
En premier, le groupe GREDICS a participé à la recherche du « Séminaire Réception et production de récits de l’histoire nationale », coordonné par la Dre Françoise Lantheaume. Nous avons fait des recherches sur l’enseignement obligatoire (en Espagne, entre 6 et 16 ans) et l’enseignement post-obligatoire, ainsi qu’avec les enseignants en formation. Nous présentons une synthèse de cette dernière partie. La recherche est basée sur le récit des étudiants sur l’histoire de la Catalogne, sur les personnages et les faits dont ils se souvenaient et sur la façon de construire le récit historique. Les participants étaient des étudiants au baccalauréat en enseignement au primaire et des étudiants à la maîtrise en enseignement au secondaire, soit 200 étudiants au total.
Les étudiants citent des éléments symboliques, des personnages et des faits de l’histoire nationale catalane : le drapeau, l’hymne, la fête nationale (11 septembre), etc. Il y a d’autres références comme les faits et les personnages de l’histoire contemporaine : les origines du catalanisme, la littérature et l’art catalans (le modernisme, l’architecte Antoni Gaudí), la Seconde République espagnole, la Guerre civile, etc. La plupart des faits sont « politiques » et « militaires ». Il y a très peu de références aux problèmes sociaux et économiques. Les personnages sont des hommes, la plupart des politiciens dominants. Il n’y a pas de minorités. Il n’y a pas de femmes.
Les récits sont linéaires et discontinus. Trente pour cent du total ne sont pas des récits, mais des listes d’évènements. Ces résultats indiquent que nous devons améliorer la formation des enseignants. Il faut également enseigner une histoire de la Catalogne comme territoire de mélange et de rencontre de différentes cultures. Il faut former la pensée historique pour comprendre le présent et pour penser au futur. L’histoire est une ressource indispensable pour l’éducation à la citoyenneté.
Une autre recherche du groupe, financée par le Ministerio de Ciencia e Innovación (ministère de la Science et de l’Innovation) et dirigée par Antoni Santisteban comme chercheur principal, s’est centrée sur la question : comment développer la compétence sociale et citoyenne en travaillant avec des problèmes sociaux? Voici les phases de la recherche : a) établir un cadre théorique; b) analyser les représentations sociales des élèves au secondaire sur les problèmes sociaux; c) élaborer et expérimenter des séquences didactiques basées sur des questions socialement vives.
a) Les recherches analysées montrent deux grands axes. Le premier indique que n’importe quel contenu scolaire peut se problématiser. Le deuxième défend un curriculum en sciences humaines basé sur des problèmes sociaux, comme « controversial issues » (questions controversées), « issues-centered education » (éducation centrée sur des questions) ou « questions socialement vives » (QSV).
b) Quelles sont les représentations des élèves à propos des problèmes sociaux? Comment les interprètent-ils? Trois cent trente-neuf élèves ont participé. Nous observons que les élèves perçoivent les problèmes éloignés de leur réalité. Leurs solutions montrent une tendance aux mesures individuelles, avec peu de confiance envers les institutions publiques. Les élèves plus âgés comprennent mieux la complexité des problèmes, mais ils trouvent aussi plus difficile de penser à des solutions.
c) À partir des résultats précédents, deux séquences didactiques ont été élaborées pour les différentes années du secondaire. Une des séquences didactiques, intitulée « Des limites, des frontières et des murs », a été testée dans cinq établissements d’enseignement de la Catalogne. Deux cent soixante-quatorze élèves ont participé (entre 12 et 17 ans). Elle est basée sur : a) une réflexion conceptuelle sur la signification de limite, de frontière et de mur; b) les murs au cours de l’histoire; c) la carte des conflits de frontières dans le monde; d) des études de cas, comme : Palestine, États-Unis/Mexique, Espagne/Maroc, Corée du Nord/Corée du Sud; e) les murs invisibles dans les villes; f) nous et les personnes de l’autre côté du mur : argumentation et contre-argumentation sur un scénario ou une simulation.
Quelques conclusions : a) il a été démontré qu’il est nécessaire de traiter des questions socialement vives; b) la réflexion conceptuelle est très importante; c) c’est important de donner une vision historique des sujets controversés; d) les élèves améliorent avec l’âge leurs perceptions de la complexité des problèmes, mais ils n’ont pas les outils pour prendre des décisions; e) les méthodes interactives, comme le débat, la simulation, l’argumentation et la contre-argumentation sont essentielles dans le développement de la compétence sociale et citoyenne.
Le groupe poursuit ses recherches, axées maintenant sur la formation de la pensée historique-sociale. Ces recherches actualisées et celles d’autres groupes internationaux seront présentées au XXVe Symposium international de la didactique des sciences sociales organisé par le GREDICS. Nous vous attendons tous à Barcelone du 8 au 10 avril 2014!
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