Enseignement de l’histoire : un grand esprit de sérieux
Dans Regards sur le monde actuel, publié en 1931, le poète Paul Valéry écrivait : « L’Histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l’intellect ait élaboré. Ses propriétés sont bien connues. Il fait rêver, il enivre les peuples, leur engendre de faux souvenirs, exagère leurs réflexes, entretient leurs vieilles plaies, les tourmente dans leur repos, les conduit au délire des grandeurs ou à celui de la persécution, et rend les nations amères, superbes, insupportables et vaines. »
S’il y a quelque chose de frappant dans le débat sur l’enseignement de l’histoire qui ressurgit de manière ponctuelle au Québec depuis aussi loin que la Seconde Guerre mondiale[2], c’est l’esprit de sérieux avec lequel, de part et d’autre, on aborde la question. Sans doute cela tient-il à l’insécurité identitaire des sociétés modernes. Dans un monde en perpétuel changement, la connaissance historique est plus nécessaire que jamais pour nous rappeler qui nous sommes. Lucide, Valéry avait bien vu que dans un pareil contexte, l’histoire est appelée à tout justifier, des actions individuelles jusqu’aux mouvements de civilisation en passant par les luttes pour les droits de la personne et les totalitarismes les plus abjects.