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Blogue d'un enseignant en histoire: septième cycle / 20 novembre au 2 décembre

Posted by Marc-André Lauzon
5 December 2013 - 8:07am

Activité de conscience historique

Intentions pédagogiques de l’activité

La première intention était de diagnostiquer le niveau de conscience historique de mes élèves de troisième secondaire.

La deuxième intention était de valider l’intégration des connaissances historiques reliées au Régime français, à l’intérieur même d’une activité de conscience historique.

La troisième intention était de valider ma grille d’évaluation.

La quatrième intention était de comparer le premier cycle au deuxième cycle.

La cinquième intention était de voir les corrélations entre l’activité de conscience historique et l’examen sur la Nouvelle-France.

Les consignes de l’activité

J’ai posé trois questions aux élèves.

  1. Pourquoi aujourd’hui, 80% de la population québécoise est de langue française ?

 

  1. Pourquoi aujourd’hui, la majorité de la population habite entre les villes de Québec et de Montréal ?

 

  1. Pourquoi aujourd’hui, la religion catholique est la principale religion du Québec ?

 

Dans le but de ne pas influencer le niveau de conscience historique de mes élèves, je n’ai pas expliqué ce qu’est la conscience historique et j’ai spécifié que je ne répondrais à aucune question.  J’ai aussi expliqué aux élèves qu’il s’agissait d’un travail individuel, mais qu’ils pouvaient s’entraider.

J’ai de surcroît fourni aux élèves un dossier documentaire expliquant la situation du Québec aujourd’hui. Oui, c’était un piège, car nous avions déjà vu les réponses historiques attendues lors des cours précédents.

J’ai laissé la possibilité aux élèves d’apporter des outils électroniques et permis l’utilisation des trois ordinateurs dans la classe.

J’avais préalablement préparé mes élèves une semaine auparavant en annonçant l’activité.

Parallèlement, mes élèves de première secondaire réalisaient la même activité, mais avec la question suivante : D’où provient la démocratie canadienne / québécoise ? Le travail était en lien avec la démocratie athénienne.

Le déroulement de l’activité

Je pensais que ça serait la catastrophe, mais c’est l’inverse qui s’est produit : les élèves ont travaillé et persévéré comme des fous. La preuve qu’il faut avoir confiance en ses élèves. Certains élèves ont eu de la difficulté à amorcer le travail et j’ai été vraiment surpris quand les plus forts sont allés aider les plus faibles, et ce, en première comme en troisième secondaire. Une fois l’activité amorcée, j’ai aussi été étonné de voir que mes élèves du premier cycle ont davantage utilisé leurs pairs que ceux de troisième secondaire.

Même si j’avais spécifié que je ne répondais pas aux questions, certains se sont essayés. La question qui est revenue le plus souvent est : « Est-ce que ça compte pour beaucoup ? ». Ma réponse fut « Si je te dis que l’activité compte pour 5%, vas-tu moins te forcer que si elle compte pour 30%? C’est pour cette raison que je ne réponds à aucune question ».

De nombreux élèves ont utilisé l’internet pour essayer de répondre aux questions. Un élève a même cherché « conscience historique » à l’aide de Google. D’autres ont tout simplement tapé les questions dans Google. Un élève est tombé sur la grille d’évaluation que j’avais préalablement publiée sur le blogue.

Tous les élèves ont été capables de terminer le travail.

La conscience historique initiale vers la conscience historique subséquente

La conscience historique c’est la compréhension du présent à l’aide du passé, et ce, dans le but d’envisager le futur (Duquette 2011).

La conscience historique comporte quatre niveaux. Le niveau primaire où l’élève est incapable de répondre, le niveau immédiat où l’élève utilise uniquement le présent, le niveau composite où l’élève utilise le présent et le passé et finalement, le niveau narratif où l’élève utilise uniquement le passé pour répondre à la question.

La conscience historique initiale dans « Le rapport entre la pensée historique et la conscience historique » (Duquette, 2011) réfère au travail initial de l’élève. Il se débrouille seul pour répondre aux questions.

La conscience historique subséquence réfère au travail de l’élève suite à l’émergence d’un conflit cognitif, à l’interprétation des documents et le retour sur le problème, et ce, à l’intérieur d’une entrevue.

Mon hypothèse de départ était que les élèves de mon groupe en troisième secondaire suivraient la courbe de conscience historique initiale des répondants de l’étude du Duquette (2011). Mon hypothèse était basée sur le fait que je n’avais jamais fait d’activité de conscience historique en classe d’histoire et que je n’avais jamais indiqué en quoi consistait la conscience historique. Et j’espérais suivre leur progression jusqu’à la fin de l’année.

Voici la courbe de la conscience historique initiale des répondants dans « Le rapport entre la pensée historique et la conscience historique » (Duquette, 2011, p. 175). J’ai fait la moyenne des trois protocoles (pauvreté, culture, soldat). Vous constaterez que la conscience historique immédiate domine au niveau initial, et ce, en raison du travail intellectuel non réalisé à l’aide des opérations de la pensée historique.

Maintenant voici, la conscience historique de mes élèves. Il y a un décalage entre les deux modèles.

Maintenant, allons voir la conscience historique subséquente des répondants de l’étude de Duquette (2011, p.179). Une fois de plus, il s’agit de la moyenne des trois protocoles.

 

Nous pouvons ainsi dire que la courbe de la conscience historique de mes élèves est semblable à celle de la conscience historique subséquente des répondants de Duquette (2011). Je ne sais pas où j’avais la tête lorsque j’ai élaboré mon hypothèse, mais en classe, nous avons travaillé la réalité historique du Régime français, dans un premier temps à l’aide de notes de cours, puis de réseaux de concepts, puis d’un imposant dossier documentaire de 92 documents. Nous avons aussi travaillé à l’aide du cahier d’exercices. À l’inverse, les répondants de Duquette étaient en cinquième secondaire et n’avaient pas préalablement (récemment) vu les connaissances rattachées aux problèmes des protocoles. Je pensais que mes élèves ne seraient pas capables d’utiliser le passé, mais oui, il va s’en dire, le cours d’histoire influence positivement la conscience historique des élèves.

Oui, mais…

J’étais en colère après moi-même, je voulais absolument aller chercher la conscience historique initiale de mes élèves et j’avais merdé. J’ai manqué mon coup, sauf qu’au moment où j’écrivais ce blogue, je commençais aussi le module sur le Changement d’empire. J’ai pu passer rapidement un questionnaire  en début de période, et ce, avant même d’aborder quoique ce soit. J’ai posé trois questions différentes avec des explications historiques similaires.

  • Pourquoi existe-t-il deux réseaux de télévision publique au Canada (SRC et CBC) ?
  • Pourquoi le Canada est constitué de neuf provinces majoritairement anglophones et d’une province majoritairement francophone ?
  •  Pourquoi le Canada a deux langues officielles : l’anglais et le français ?

 

 

Cette fois, aucun n’élève fait la démonstration d’une conscience historique narrative. Le problème est le suivant : si un élève répond à une question avec des arguments uniquement historique et répond à une autre question avec des arguments uniquement présents, je le place dans la conscience historique composite, car il s’agit d’un travail global.

Voici un tableau qui présente la conscience historique des élèves, mais question par question. Il s’agit des questions sur la dualité franco-anglaise.

 

Question par question, le portait est très différent. J’ai de grands écarts chez certains élèves : par exemple, certains ont une conscience historique immédiate ou primaire à la première question, mais une conscience historique narrative à la dernière question.

Pourtant l’argument historique est le même pour les trois questions, sauf qu’à la question sur la télévision nationale, les élèves ont tout simplement utilisé l’argument qu’il y avait des anglophones et des francophones au Canada. Est-ce en raison de la proximité culturelle avec la télévision ? Je ne sais pas trop. S’agirait-il que les élèves ne font pas un lien entre gouvernement fédéral et télévision nationale, raisonnement présent lorsqu’il est question des provinces et des langues officielles?

Si on revient à l’activité de conscience historique, dont il est principalement question dans le blogue de cette semaine, le constat est le même : pris indépendamment les uns des autres, il y a beaucoup plus de paragraphes au niveau narratif que composite. 72% des paragraphes sont au niveau narratif et seulement 20% au niveau composite. Ce qui veux dire que les élèves qui sont au niveau composite le sont parce qu’ils ont un seul argument au présent.

Petite nuance : lorsque nous comparons les réponses paragraphe par paragraphe de l’activité de conscience historique liée au Régime français avec celle sur le Régime anglais (dualité), la première est beaucoup moins marquée par des écarts entre les différents niveaux de conscience historique des élèves. Mon hypothèse est que les connaissances acquises sur le Régime français réduisent l’écart entre les différents niveaux de conscience historique. À l’inverse, n’ayant pas vu aucun élément/connaissance du Régime anglais, la conscience historique des élèves est beaucoup plus contrastée d’une question à l’autre.

D’autres analyses

Je n’ai pas terminé complètement l’analyse et il en sera encore question lors du prochain blogue. Nous verrons la corrélation entre l’activité de conscience historique et l’examen sur la Nouvelle-France. Nous verrons aussi les termes de perspectives utilisés par les élèves. Il sera aussi question de l’activité du récit multi-perspective que j’ai réalisée avec les élèves.