Mettre en cause les idées reçues
16 December 2012 - 11:54am
Pour la vaste majorité des enseignants, trouver les moyens de motiver ses élèves est une préoccupation qui confine à l’obsession. En effet, nous sommes presque tous convaincus que la motivation de nos élèves est la clé de leur succès. Or, dans une thèse soutenue en novembre 2011 à l’Université de Paris Ouest Nanterre, Julien Masson conclut que l’intérêt que porte l’élève pour les activités scolaires a un effet négligeable sur les performances réalisées à l’école. En bref, ce n’est pas parce qu’un élève s’intéresse à l’histoire, ou qu’il cherche à faire bonne figure dans cette matière, qu’il réussit mieux. Dans sa thèse, Masson montre aussi que la maîtrise du français et la confiance qu’a l’élève en ses capacités langagières sous-tendent en grande partie la réussite dans la plupart des matières.
Les idées que défend Didier Carriou, dans son récent ouvrage, Écrire l’histoire scolaire. Quand les élèves écrivent en classe pour apprendre l’histoire (Presses de l’Université de Rennes, 2012), vont dans le même sens que celles de Masson. Toutefois, il apporte une nuance importante. À la suite de chercheurs comme Bernard Lahire, Carriou soutient que l’échec scolaire, en histoire comme dans d’autres matières, est lié à «une méconnaissance des usages sociaux du langage utilisé à l’école» plutôt qu’à la méconnaissance de la langue française. Ainsi, la construction réussie des savoirs à l’école serait largement déterminée par l’apprentissage et l’usage de pratiques langagières propres à chaque discipline scolaire. Alors, pourquoi s’entêter à trouver des trucs pour motiver nos élèves et s’enliser dans un enseignement encore très largement factuel?
Michel P. Trudeau