Rendre visibles les perspectives historiques
23 November 2015 - 10:49am
Le mois dernier, à l’invitation de David Scott de l’Université de Calgary, j’ai eu la chance de donner une présentation via Skype à de futurs enseignants de social studies au secondaire. J’ai rencontré David en 2013 à l’Université Laval alors qu’il effectuait un voyage d’études financé par THEN/HiER (programme Doctorant invité). Je l’ai revu ce printemps, alors que j’étais Doctorant invité à l’Université d’Alberta.
Depuis qu’on se connait, Dave et moi avons beaucoup discuté du concept de perspective historique, cette façon de concevoir le passé à partir de nos valeurs et de nos appartenances sociales. Le curriculum scolaire en Alberta requiert que les enseignants de social studies ainsi que leurs élèves se sensibilisent aux perspectives historiques que possèdent les francophones et les Amérindiens au sujet de l’histoire du Canada. Or, Dave l’a bien montré dans son mémoire de maîtrise, les enseignants peinent à appliquer cette directive ministérielle en classe. Ils disent manquer d’exemples concrets pour illustrer ce qu’est une perspective historique. Avec ce souci en tête, Dave et moi avons planifié une activité pédagogique afin de rendre visible le concept de perspective historique et, ce faisant, équiper de futurs enseignants de social studies à faire face aux demandes curriculaires en Alberta. Voici un compte rendu de cette activité.
En premier lieu, les futurs enseignants devaient résumer l’histoire du Canada en quelques phrases sur une feuille de papier. Les étudiants ont ensuite échangé leur feuille de réponse. Dès lors, plusieurs perspectives vis-à-vis l’histoire canadienne étaient sur la table. Les élèves ont pu constater que les valeurs et les appartenances de chacun modelaient leur vision respective du passé. Pour ce faire, Dave et moi avons dirigé une discussion de groupe au sujet des réponses obtenues (ex. pourquoi avoir écrit cela et non autre chose?).
La deuxième partie de l’activité visait la comparaison de plusieurs perspectives historique : celles des élèves de la classe et celle d’autres Canadiens résidents au Québec ou en Alberta. Pour ce faire, j’ai utilisé des réponses fournies par des Québécois francophones ou des Albertains au sein d’un sondage que j’ai analysé dans mon mémoire de maîtrise. Ces Canadiens devaient répondre à la même question posée aux étudiants en début d’activité : «Comment résumeriez l’histoire du Canada en quelques phrases ». En petits groupes, les élèves étaient invités à évaluer la valeur ces réponses (traduites) :
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Les élèves pouvaient ainsi «voir» à quoi ressemble la perspective de certains francophones par rapport à l’histoire du Canada, et comparer celle-ci à la leur.
Enfin, les élèves étaient invités à comparer ces réponses avec celles produites par des Albertains.
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Pour conclure, les élèves étaient invités à partager leur commentaire à propos de l’activité. Certains ont mentionné que l’activité leur avait permis de «voir» plus clairement ce qu’était une perspective historique. D’autres ont proposé une autocritique de leur propre perspective en notant l'influence de leur sentiment d’appartenance (Canadiens vivant en Alberta) sur leur perception du passé. Un élève a noté sa difficulté à confronter son interprétation (limitée) du passé.
L’activité s’est conclue par un exposé de moi et David à propos de l’importance de reconnaître la présence des perspectives historiques en classe. De plus, nous avons incité les élèves à évaluer ces perspectives lorsqu’ils deviendront enseignants, à l’aide de questions comme «comment résumeriez-vous l’histoire du Canada en quelques phrases». Enfin, nous avons proposé des méthodes pour analyser les réponses obtenues de manière à décrypter la valeur et l’origine des perspectives historiques, de manière à mieux comprendre leur possible rôle au sein de débat comme celui concernant le port du Niqab lors du serment de citoyenneté; un débat qui avait cours à ce moment dans la société canadienne .
L’activité sera reproduite cet hiver à Calgary. D’ici là, les commentaires pour l’améliorer sont les bienvenues.