Faire de l’histoire c’est presque un jeu d’enfant…
15 July 2014 - 11:01am
Vous m’avez peut-être lu auparavant sur mes petites critiques didactiques sur la rencontre de l’Histoire et de la fiction (voir mes publications précédentes). Que ce soit un film, un jeu vidéo ou un autre média, l’Histoire est souvent utilisée à toutes les sauces afin de faire mousser quelques ventes. On fait appel à l’exotisme, au patriotisme, au devoir de mémoire, etc. Le dernier opus annoncé d’Ubisoft n’est pas étranger à ces procédés. Assassin’s Creed Unity, sous fond de révolution française au XVIIIème siècle, propose rien de moins de faire partie de l’Histoire en jouant à ce jeu et revivre certains évènements historiques. La toute dernière bande-annonce, bien que révélant peu sur des faits historiques précis, ne se cache pas de son objectif : « Make History »… Car la recette est bonne, elle vend, elle profite. Mais à qui? D’un point de vue purement ludique certains y trouveront certainement leur compte, mais qu’en est-il de l’apprentissage de l’histoire? Est-ce que faire partie de l’histoire, suffit à la comprendre ou du moins à appréhender les processus de la pensée historique?
Pour l’instant, l’heure n’est pas à la critique de ce jeu puisqu’il n’est pas encore sorti, il est annoncé pour cet automne. Cependant, les mêmes jeux de cette série continuent de fasciner par leur réalisme en proposant une fenêtre sur le passé. Fenêtre qui n’est d’ailleurs pas si trouble que cela puisqu’Ubisoft continue de s’entourer d’historiens (voir ici pour AC3 et ici pour AC4) pour recréer un environnement historique réaliste (personnages, évènements, architecture, etc.). En fait, tout comme le film historique résulte de choix influencés par la société ou les débats historiographiques contemporains, la création d’un jeu vidéo historique n’y échappe pas. Il semble impossible de pouvoir recréer avec certitude et exactitude une société passée, même si nous disposons de traces historiques. Cela dit, faire de l’histoire n’est pas impossible. Cela passe nécessairement par la lecture, la comparaison, la critique de diverses traces historiques, mais aussi de leurs interprétations actuelles. Est-ce qu’un jeu vidéo peut permettre cet exercice ardu?
À prime abord, non… Le jeu est conçu pour divertir. Tant mieux s’il est en plus historique. Mais le but ultime du jeu est de progresser et de gagner. Faire de l’histoire n’est certainement pas un objectif à poursuivre. Toutefois, comme tout produit d’une société, cet artefact historique est porteur de débats et de questionnement proprement historiques. Et c’est là que l’usage d’un jeu vidéo historique prend tout son sens. Jouer au jeu certainement, mais aussi se questionner sur son contenu, sur les choix éditoriaux, sur les relations d’agentivité, sur la représentation des personnages historiques, et j’en passe. D’ailleurs, je ne suis pas le seul à le considérer, des cours sont déjà offerts sur une authentique analyse du jeu historique (voir ici et là).
Alors, l’invitation d’Ubisoft, « Make History », peut sembler fallacieuse, mais ne l’est pas si les bons outils sont utilisés. Faire de l’histoire c’est presque un jeu d’enfant, il suffit de le faire…